Les intrépides chemins de l'école Pour des millions d'enfants dans le monde, aller à l'école est un défi quotidien. Pauvreté, isolement, guerre, insécurité se dressent comme autant d'obstacles devant leur quête de savoir. Leur ténacité est une leçon de vie Le Triomphe de la volonté il est dommage que la formule soit déjà prise, au service de tout autre chose, parce que sinon, c'est exactement ce que l'on pourrait dire de ces enfants qui, chaque matin, franchissent des obstacles inimaginables en nos contrées, pour simplement aller à l'école. Le Triomphe de la volonté: l'expression est désuète, monumentale, un peu excessive, mais il faudrait ça, élever un monument à ces enfants qui, au quotidien, surmontent d'inconcevables difficultés, traversant le désert à cheval, traversant la banquise en motoneige alors que le jour ne se lèvera pas, traversant un fleuve de boue sur un pont de bateau, suivant une voie de chemin de fer à pied, car dans la cohue il n'y a que là où l'on puisse marcher ; tout ça chaque jour, pour simplement aller à l'école. Pour aller où? À l'école? Les enfants qui sont les nôtres en pousseraient des cris scandalisés, incrédules, moqueurs. Voilà longtemps que chez nous, on ne déplace plus les montagnes pour aller à l'école. S'il y a chute de neige, gros rhume, ou grève de bus, on reste au lit, et puis voilà. ...
. - C'est splendide, de voir partout dans le monde que de petits enfants font tout pour atteindre leur salle de classe et apprendre à lire, et c'est terrible que nos enfants n'en aient plus tellement envie. Mais ils n'y sont pas pour grand-chose: tout est si perfectionné, si organisé, l'école est tellement intégrée dans notre vie qu'on ne la désire plus. Elle devient une contrainte, un obstacle au plaisir, l'endroit ennuyeux de la vie, alors qu'il est tant d'endroits amusants où l'on pourrait être.
- Nos enfants n'ont peut-être pas grand-chose à fuir, pas grand-chose à atteindre qu'ils n'auraient pas, pour que leur vienne un désir d'école qui leur fasse traverser jungle et banquise. On ne peut guère leur en vouloir: les enfants ont par nature le nez sur le réel, et il faut avoir déjà grandi pour acquérir une distance qui permette de saisir que ce que l'on fait maintenant portera ses fruits plus tard.
- Il est frappant que les photos correspondent à des cas très particuliers: une jeune fille handicapée, des enfants roms, les petits îliens ramassés en bateau, l'école en Guyane...... Ceux-là savent ce qu'il faut surmonter: l'isolement, la jungle, le handicap, la pauvreté extrême. Ce qui, heureusement, n'est pas le sort de la plupart de nos enfants. Alors ce désir d'école, qui fut celui de nos grands-parents, qui est celui des régions pauvres ou malmenées de notre Terre
Comment le retrouver ici? o
Faut-il s'efforcer d'améliorer l'école jusqu'à ce que les enfants y trouvent du plaisir? Et ce plaisir les pousserait à y venir avec enthousiasme? Mais le plaisir d'école n'est jamais immédiat, à moins de faire de l'animation plutôt que de l'éducation. L'école n'a pas vocation à être un lieu de plaisir, et si le plaisir y advient, c'est de surcroît, et souvent pour des raisons inattendues. Ce qui est censé intéresser les élèves ne les intéresse pas de façon sûre, tant plaisir et intérêt sont des sentiments fluctuants, qui peuvent s'attacher à tout, et se détacher de tout. Ce qu'on appelle le goût de l'effort n'est pas une fonction naturelle de l'homme. Il faut d'abord franchir la fatigue, l'ennui, l'angoisse de la contrainte, avant d'accéder au plaisir, et le franchissement, hélas, se fera de force. |